312

Publication sollicitée ou nécessaire

312 Nul n’est réputé publier un libelle diffamatoire du seul fait qu’il publie une matière diffamatoire :

a) sur l’invitation ou le défi de la personne à l’égard de qui elle est publiée;

b) dont la publication s’impose pour réfuter une matière diffamatoire publiée à son égard par une autre personne,

s’il croit que la matière diffamatoire est vraie et qu’elle se rattache à l’invitation, au défi ou à la réfutation nécessaire, selon le cas, et ne dépasse sous aucun rapport ce qui est raisonnablement suffisant dans les circonstances.

313

Réponse à des demandes de renseignements

313 Nul n’est réputé publier un libelle diffamatoire pour la seule raison qu’il publie, en réponse à des demandes de renseignements qui lui sont faites, une matière diffamatoire sur un sujet concernant lequel la personne par qui, ou pour le compte de qui, les demandes sont adressées, a intérêt à connaître la vérité, ou que, pour des motifs raisonnables, la personne qui publie la matière diffamatoire croit avoir un tel intérêt, si, à la fois :

a) la matière est publiée de bonne foi dans le dessein de fournir des renseignements en réponse aux demandes;

b) la personne qui publie la matière diffamatoire la croit vraie;

c) la matière diffamatoire se rapporte aux demandes;

d) la matière diffamatoire n’excède, sous aucun rapport, ce qui est raisonnablement suffisant dans les circonstances.

314

Le fait de donner des renseignements à la personne intéressée

314 Nul n’est réputé publier un libelle diffamatoire pour la seule raison qu’il révèle à une autre personne une matière diffamatoire, dans le dessein de donner à cette personne des renseignements sur un sujet à l’égard duquel elle a, ou, de l’avis raisonnablement motivé de la personne qui les fournit, possède un intérêt à connaître la vérité sur ce sujet, pourvu que, à la fois :

a) la conduite de la personne qui donne les renseignements soit raisonnable dans les circonstances;

b) la matière diffamatoire se rapporte au sujet;

c) la matière diffamatoire soit vraie ou, si elle ne l’est pas, qu’elle soit faite sans malveillance envers la personne diffamée, et avec la croyance raisonnablement motivée qu’elle est vraie.

315

Publication de bonne foi en vue de redresser un tort

315 Nul n’est réputé publier un libelle diffamatoire du seul fait qu’il publie une matière diffamatoire de bonne foi dans le dessein de chercher une réparation ou un redressement pour un tort ou grief, privé ou public, auprès d’une personne qui a, ou qu’il croit, pour des motifs raisonnables, avoir le droit ou l’obligation de réparer le tort ou grief ou d’en opérer le redressement, si, à la fois :

a) il croit que la matière diffamatoire est vraie;

b) la matière diffamatoire se rattache à la réparation ou au redressement recherché;

c) la matière diffamatoire n’excède, sous aucun rapport, ce qui est raisonnablement suffisant dans les circonstances.

316

Preuve de publication par ordre d’une législature

316 (1) Un prévenu qui aurait publié un libelle diffamatoire peut, à toute étape des procédures, produire une preuve pour démontrer que la matière prétendue diffamatoire était contenue dans un document publié par ordre ou sous l’autorité du Sénat ou de la Chambre des communes, ou d’une législature provinciale.

Verdict à rendre

(2) Lorsque, à toute étape des procédures mentionnées au paragraphe (1), le tribunal, juge, juge de paix ou juge de la cour provinciale est convaincu que la matière prétendue diffamatoire était contenue dans un document publié par ordre ou sous l’autorité du Sénat ou de la Chambre des communes, ou d’une législature provinciale, il ordonne que soit enregistré un verdict de non-culpabilité et libère le prévenu.

Certificat de l’ordre

(3) Pour l’application du présent article, un certificat signé par le président ou greffier du Sénat ou de la Chambre des communes, ou d’une législature provinciale, portant que la matière prétendue diffamatoire était contenue dans un document publié par ordre ou sous l’autorité du Sénat, de la Chambre des communes ou de la législature, selon le cas, en constitue une preuve concluante.

317

Verdicts dans les cas de libelle diffamatoire

317 Si, à l’instruction d’un acte d’accusation d’avoir publié un libelle diffamatoire, il y a plaidoyer de non-culpabilité, le jury assermenté pour juger l’affaire peut rendre un verdict général de culpabilité ou de non-culpabilité sur toute la matière débattue à la suite de l’acte d’accusation; le juge ne peut prescrire ni donner instruction au jury de déclarer le défendeur coupable sur la simple preuve de la publication que ce dernier a faite du prétendu libelle, et du sens y attribué dans l’accusation. Cependant, le juge peut, à sa discrétion, donner au jury des instructions ou une opinion sur la matière en litige, comme dans d’autres procédures pénales, et le jury peut, sur l’affaire, rendre un verdict spécial.

318

Encouragement au génocide

318 (1) Quiconque préconise ou fomente le génocide est coupable d’un acte criminel passible d’un emprisonnement maximal de cinq ans.

Définition de génocide

(2) Au présent article, génocide s’entend de l’un ou l’autre des actes suivants commis avec l’intention de détruire totalement ou partiellement un groupe identifiable, à savoir :

a) le fait de tuer des membres du groupe;

b) le fait de soumettre délibérément le groupe à des conditions de vie propres à entraîner sa destruction physique.

Consentement

(3) Il ne peut être engagé de poursuites pour une infraction prévue au présent article sans le consentement du procureur général.

Définition de groupe identifiable

(4) Au présent article, groupe identifiable s’entend de toute section du public qui se différencie des autres par la couleur, la race, la religion, l’origine nationale ou ethnique, l’âge, le sexe, l’orientation sexuelle, l’identité ou l’expression de genre ou la déficience mentale ou physique.

319

Incitation publique à la haine

319 (1) Quiconque, par la communication de déclarations en un endroit public, incite à la haine contre un groupe identifiable, lorsqu’une telle incitation est susceptible d’entraîner une violation de la paix, est coupable :

a) soit d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de deux ans;

b) soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.

Fomenter volontairement la haine

(2) Quiconque, par la communication de déclarations autrement que dans une conversation privée, fomente volontairement la haine contre un groupe identifiable est coupable :

a) soit d’un acte criminel et passible d’un emprisonnement maximal de deux ans;

b) soit d’une infraction punissable sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire.

Défenses

(3) Nul ne peut être déclaré coupable d’une infraction prévue au paragraphe (2) dans les cas suivants :

a) il établit que les déclarations communiquées étaient vraies;

b) il a, de bonne foi, exprimé une opinion sur un sujet religieux ou une opinion fondée sur un texte religieux auquel il croit, ou a tenté d’en établir le bien-fondé par argument;

c) les déclarations se rapportaient à une question d’intérêt public dont l’examen était fait dans l’intérêt du public et, pour des motifs raisonnables, il les croyait vraies;

d) de bonne foi, il voulait attirer l’attention, afin qu’il y soit remédié, sur des questions provoquant ou de nature à provoquer des sentiments de haine à l’égard d’un groupe identifiable au Canada.

Confiscation

(4) Lorsqu’une personne est déclarée coupable d’une infraction prévue à l’article 318 ou aux paragraphes (1) ou (2) du présent article, le juge de la cour provinciale ou le juge qui préside peut ordonner que toutes choses au moyen desquelles ou en liaison avec lesquelles l’infraction a été commise soient, outre toute autre peine imposée, confisquées au profit de Sa Majesté du chef de la province où cette personne a été reconnue coupable, pour qu’il en soit disposé conformément aux instructions du procureur général.

Installations de communication exemptes de saisie

(5) Les paragraphes 199(6) et (7) s’appliquent, compte tenu des adaptations de circonstance, à l’article 318 et aux paragraphes (1) et (2) du présent article.

Consentement

(6) Il ne peut être engagé de poursuites pour une infraction prévue au paragraphe (2) sans le consentement du procureur général.

Définitions

(7) Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article.

communiquer S’entend notamment de la communication par téléphone, radiodiffusion ou autres moyens de communication visuelle ou sonore. (communicating)

déclarations S’entend notamment des mots parlés, écrits ou enregistrés par des moyens électroniques ou électromagnétiques ou autrement, et des gestes, signes ou autres représentations visibles. (statements)

endroit public Tout lieu auquel le public a accès de droit ou sur invitation, expresse ou tacite. (public place)

groupe identifiable A le sens que lui donne l’article 318. (identifiable group)

320

Mandat de saisie

320 (1) Un juge convaincu, par une dénonciation sous serment, qu’il existe des motifs raisonnables de croire qu’une publication, dont des exemplaires sont gardés aux fins de vente ou de distribution dans un local du ressort du tribunal, est de la propagande haineuse, émet, sous son seing, un mandat autorisant la saisie des exemplaires.

Sommation à l’occupant

(2) Dans un délai de sept jours après l’émission du mandat, le juge adresse à l’occupant du local une sommation lui ordonnant de comparaître devant le tribunal et d’exposer les raisons pour lesquelles il estime que ce qui a été saisi ne devrait pas être confisqué au profit de Sa Majesté.

Le propriétaire et l’auteur peuvent comparaître

(3) Le propriétaire ainsi que l’auteur de ce qui a été saisi et qui est présumé être de la propagande haineuse peuvent comparaître et être représentés dans les procédures pour s’opposer à ce qu’une ordonnance de confiscation soit rendue.

Ordonnance de confiscation

(4) Si le tribunal est convaincu que la publication est de la propagande haineuse, il rend une ordonnance la déclarant confisquée au profit de Sa Majesté du chef de la province où les procédures ont lieu, pour qu’il en soit disposé comme peut l’ordonner le procureur général.

Disposition de ce qui a été saisi

(5) Si le tribunal n’est pas convaincu que la publication est de la propagande haineuse, il ordonne que ce qui a été saisi soit remis à la personne entre les mains de laquelle cela a été saisi, dès l’expiration du délai imparti pour un appel final.

Appel

(6) Il peut être interjeté appel d’une ordonnance rendue aux termes des paragraphes (4) ou (5) par toute personne qui a comparu dans les procédures :

a) pour tout motif d’appel n’impliquant qu’une question de droit;

b) pour tout motif d’appel n’impliquant qu’une question de fait;

c) pour tout motif d’appel impliquant une question mixte de droit et de fait,

comme s’il s’agissait d’un appel contre une déclaration de culpabilité ou contre un jugement ou verdict d’acquittement, selon le cas, sur une question de droit seulement en vertu de la partie XXI, et les articles 673 à 696 s’appliquent, compte tenu des adaptations de circonstance.

Consentement

(7) Il ne peut être engagé de poursuites en vertu du présent article sans le consentement du procureur général.

Définitions

(8) Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article.

génocide A le sens que lui donne l’article 318. (genocide)

juge Juge d’un tribunal. (judge)

propagande haineuse Tout écrit, signe ou représentation visible qui préconise ou fomente le génocide, ou dont la communication par toute personne constitue une infraction aux termes de l’article 319. (hate propaganda)

tribunal

a) Dans la province de Québec, la Cour du Québec;

a.1) dans la province d’Ontario, la Cour supérieure de justice;

b) dans les provinces du Nouveau-Brunswick, du Manitoba, de la Saskatchewan et d’Alberta, la Cour du Banc de la Reine;

c) dans la province de Terre-Neuve-et-Labrador, la Section de première instance de la Cour suprême;

c.1) [Abrogé, 1992, ch. 51, art. 36]

d) dans les provinces de la Nouvelle-Écosse, de la Colombie-Britannique et de l’Île-du-Prince-Édouard, au Yukon et dans les Territoires du Nord-Ouest, la Cour suprême;

e) au Nunavut, la Cour de justice. (court)

320.1

Mandat de saisie

320.1 (1) Le juge peut, s’il est convaincu par une dénonciation sous serment qu’il y a des motifs raisonnables de croire qu’il existe une matière  —  qui constitue de la propagande haineuse au sens du paragraphe 320(8) ou contient des données informatiques, au sens du paragraphe 342.1(2), qui rendent la propagande haineuse accessible  —  qui est emmagasinée et rendue accessible au public au moyen d’un ordinateur au sens du paragraphe 342.1(2) situé dans le ressort du tribunal, ordonner au gardien de l’ordinateur :

a) de remettre une copie électronique de la matière au tribunal;

b) de s’assurer que la matière n’est plus emmagasinée ni accessible au moyen de l’ordinateur;

c) de fournir les renseignements nécessaires pour identifier et trouver la personne qui a affiché la matière.

Avis à la personne qui a affiché la matière

(2) Dans un délai raisonnable après la réception des renseignements visés à l’alinéa (1)c), le juge fait donner un avis à la personne qui a affiché la matière, donnant à celle-ci l’occasion de comparaître et d’être représentée devant le tribunal et de présenter les raisons pour lesquelles la matière ne devrait pas être effacée. Si la personne ne peut être identifiée ou trouvée ou ne réside pas au Canada, le juge peut ordonner au gardien de l’ordinateur d’afficher le texte de l’avis à l’endroit où la matière était emmagasinée et rendue accessible, jusqu’à la date de comparution de la personne.

Personne qui a affiché la matière : comparution

(3) La personne qui a affiché la matière peut comparaître et être représentée au cours de la procédure pour s’opposer à l’établissement d’une ordonnance en vertu du paragraphe (5).

Personne qui a affiché la matière : non comparution

(4) Si la personne qui a affiché la matière ne comparaît pas, le tribunal peut statuer sur la procédure, en l’absence de cette personne, aussi complètement et effectivement que si elle avait comparu.

Ordonnance

(5) Si le tribunal est convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que la matière est accessible au public et constitue de la propagande haineuse au sens du paragraphe 320(8) ou contient des données informatiques, au sens du paragraphe 342.1(2), qui rendent la propagande haineuse accessible, il peut ordonner au gardien de l’ordinateur de l’effacer.

Destruction de la copie électronique

(6) Au moment de rendre une ordonnance en vertu du paragraphe (5), le tribunal peut ordonner la destruction de la copie électronique qu’il possède.

Sort de la matière

(7) Si le tribunal n’est pas convaincu que la matière est accessible au public et constitue de la propagande haineuse au sens du paragraphe 320(8) ou contient des données informatiques, au sens du paragraphe 342.1(2), qui rendent la propagande haineuse accessible, il ordonne que la copie électronique soit remise au gardien de l’ordinateur et met fin à l’ordonnance visée à l’alinéa (1)b).

Application d’autres dispositions

(8) Les paragraphes 320(6) à (8) s’appliquent, avec les adaptations nécessaires, au présent article.

Ordonnance en vigueur

(9) L’ordonnance rendue en vertu de l’un des paragraphes (5) à (7) n’est pas en vigueur avant l’expiration de tous les délais d’appel.